En guise de bonne année, un ami m’a dit « Quelles sont les limites de l’homme ? ». Comme c’est un ami né dans un camp de concentration et qu’il a manqué ne pas survivre « à la chose », j’ai perçu un peu de tristesse dans sa question. Surtout lorsqu’il a rajouté : c’est vrai ! Après une guerre on fait presque tous le vœu que « plus jamais ça ». Et quelques temps après…
Mon ami a-t-il raison de poser sa question ? Je crois que c’est un cadeau inconfortable qu’il nous fait, en ce début de « bonne année ». Mais un cadeau qu’il nous faut regarder, en ce moment particulier où beaucoup se demandent si on peut encore se souhaiter une bonne année… de vie.
Nous faudrait-il juste apprendre à vivre, alors que nous ne sommes que « programmés à survivre » ?
Un choix d’évolution ?
La science est formelle :
1- Je suis programmé à chercher ce qui pourrait ne pas (m’) aller. Il en va de ma survie.
2- Nos pensées sont interconnectées et, en rebond, nous reviennent. Puis elles re-glissent à travers nous, imprégnées d’un passé plutôt dramatique.
Alors serions-nous principalement en train de chercher ce qui ne va pas, pour chacun de nous, nous renvoyant les uns aux autres, en miroir, ces choses qui pourraient ne pas nous aller ? Serions-nous, plus fort que nous, en train de maintenir un programme de survie quand nous pourrions tout simplement apprendre à vivre ? Vivre, ce fait nouveau, à l’échelle des cerveaux.
Nous verrons aussi dans cet article que c’est possible de fuir ses responsabilités derrière les mascarades. Nos vies en surchauffe et nos organismes sous-pression produisent en permanence des doses élevées de cortisol, cette hormone du mauvais stress qui nous paralyse et nous empêche d’apprendre et de comprendre par nous-mêmes. Nos cerveaux embrumés de vapeur de cortisol n’ont plus qu’à rétrécir le cadre du jeu pour ne plus voir les fumées. Facile alors de faire semblant d’être « Open » pour faire « le saut en Australie !
« Quelles sont les limites de l’homme ? » Voici ma petite réponse. Espérant qu’elle nous inspirera à toutes et tous une année plus libre, apprenante, responsable… une vraie bonne année ! Que je nous souhaite.
Je vais te raconter l’histoire d’une étincelle qui n’est pas encore un incendie. Voici l’histoire réelle d’un petit bonhomme, dans les normes. Âgé de 8 ans, l’enfant n’a pas encore conscience qu’il a, parfois, le choix des modèles. Alors il joue, gentiment, dans la chambre de son grand frère. Et il apprend…
Suite de l’histoire
…Il apprend certes un peu par lui-même mais surtout se modélise : en miroir ! Son cerveau engramme ce qu’on lui enseigne « être merveilleux ». Et un jour il le restituera. A sa façon (c’est-à-dire beaucoup comme il a été façonné !). Pour le moment notre petit gars est en paix. Joyeux, fier, confiant, heureux, il joue gentiment aux côtés de son grand frère.
A côté du petit, un héros de son époque, le grand frère, lui aussi « s’amuse gentiment ». Il s’occupe sur son ordinateur chéri, sans même se demander si son épiphyse (glande pinéale) souffre de la résonnance des microprocesseurs ( !!). De façon virtuelle et sans aucune pitié, ce « grand frère modèle » dessoude habilement des ennemis à grand coup de manette vibrante.
Scène classique :
Les enfants se croient heureux. Et ils le sont. Ils le sont puisqu’ils s’aiment et sont bien ensemble (bien qu’absorbés dans leurs activités distinctes). Présents l’un à l’autre ils échangent à différents niveaux de conscience. Il n’y a, en apparence, aucun danger dans cette maison. « Ils ont bien le droit de s’amuser un peu, oui ? ». Oui, c’est ça, amusons-nous.
Accompagné d’une scénarisation saisissante par les programmeurs d’Enfants, les deux joueurs sont évidemment saisis par les histoires qui, elles, se jouent d’eux. Et, sans vraiment s’en apercevoir, ils interagissent, communiquent bien au-delà des mots.
Le maître principal est-il l’ordinateur ?
À l’intérieur des deux cerveaux s’enseignent, consciemment et inconsciemment, des chemins neuronaux. Dans cette histoire, en miroir, le petit prend les chemins neuronaux du grand, tout comme le grand s’inspire du petit. Principe d’intussusception : je nourris mes cellules de ce que j’observe.
Si, sur un vrai champ de bataille, le grand frère faisait la guerre pour de vrai et que son capitaine plaçait un électroencéphalogramme sur sa tête de vrai soldat, ce serait les mêmes chemins neuronaux que nous verrions se créer dans sa tête. Les mêmes chemins que lui s’amusant sur son écran de jeux virtuels. Et il en va de même pour le petit frère qui, vivant un moment de bonheur fraternel, protégé par le grand, associe ce bonheur paisible à la guerre qui se déroule dans sa tête et sur l’écran.
Dans ce cadre en apparence normal, voilà comment la guerre devient un bonheur normal et familial ! À cela s’ajoute encore une autre dimension, que les neurosciences révèlent : au moment où pourrait s’ouvrir une fenêtre fondamentale dans le développement de l’empathie (entre 8 et 12 ans), celle-ci se referme sur un jeu virtuel où les deux enfants n’occupent tous les deux qu’une seule place : celle du guerrier sanguinaire, vainqueur et puissant. L’empathie en pâtit donc !
Bien sûr, les deux enfants ne vont pas sortir de la chambre pour aller donner des coups de rangers dans la tête de celle ou celui qui aurait dû remplir le frigo. Bien sûr, toutes et tous n’iront pas mourir à la guerre ! Mais combien d’entre nous survivront au milieu des guerres financières – et autre mesquineries, indignes de nous.
Dans mon histoire, bien réelle, j’aimerais que les cerveaux des enfants s’équilibrent « de bons sens » mais j’ai des doutes : un petit bout de bois trouvé dans le jardin pour jouer à « pan pan t’es mort / même pas vrai » n’a évidemment pas la puissance, ni le même sens qu’une réalité virtuelle (!!) augmentée – avec laquelle je ne peux que réagir en fonction du programme.
Que se passe-t-il dans ma tête ? Surtout que, dans le transistor, passe une publicité « Je voudrais être le souffle après la tempête », dit la petite voix du soldat. Et la grosse voix (off) résonne, pour l’intérieur des braves « armée de terre – votre volonté : notre fierté ». Le media radio que j’ai choisi (pour ses programmes) me parle : stimule mes propres programmes. Puis, sous l’effet acquit du cortisol, influence grandement ma façon d’appréhender/penser/agir !
Comment je peux non pas réagir mais répondre ? Probablement en prenant au sérieux le témoignage de ceux qui savent les tristesses de ce qui n’est pas un jeu – ne devrait pas en être un.
- en prenant conscience de ce qui est. Et aussi de l’endroit d’où nous venons. Et aussi là où nous voulons aller.
- en tentant (et avec ténacité) des attitudes congruentes avec nos valeurs citoyennes.
- en faisant de mon mieux pour dire ce que je perçois et veux. Assertif.
L’argent, « le nerf de la guerre » ?
Comment ne pas recréer « l’histoire qui recrée l’histoire que nous ne voulons plus » ?
Juste en prenant conscience que nous -organismes survivants- sommes programmés à faire la guerre. Mais que ça n’est pas comme ça que nous pouvons être heureux. Même si nous sommes les plus forts. Ou les plus riches !
Quoi qu’en disent les publicités, ça n’est ni en prenant l’avion pour réchauffer l’atmosphère, ni en asphyxiant les sportifs de l’Open d’Australie que nous arriverons à être heureux pour de vrai. S’il est possible de comprendre pourquoi un joueur joue sa santé et comment toute une organisation se joue de notre santé, c’est évidemment plus difficile pour mon estime de ne pas faire ce qui me semble juste, au-delà de l’argent qui me pousse à…
Le paradoxe du tennisman cuit à l’étouffée (et riche survivant de ses actes !) nous enseigne probablement que le bonheur de vivre, aujourd’hui, nécessite de résoudre quelques paradoxes (de survie).
Voilà, mon article est maintenant (presque) terminé. Et maintenant qu’est-ce qu’on fait ?
Essaie-t-on ensemble d’aller plus loin ? Sans une communication plus assertive je crois que nous n’arriverons pas à retoucher aux programmes de mauvaises destructions, car nous sommes maintenant programmés par un passé « à se faire la guerre » – y compris sur le plan financier (ça nous occupe souvent à plein temps !).
Le contraire de l’ennui, n’est pas la distraction, ni le passe-temps. Le contraire de l’ennui s’appelle « l’émerveillement ». Le marketing l’a bien compris, lui qui tire les ficelles des marionnettes endormies que nous sommes, parfois ! Le monde merveilleux est le contraire d’une mascarade. Chez les braves gens, courageux, il s’appelle une tarte aux pommes, un lever de soleil, quelques crêpes bien faites et partagées. Un bonheur réel, digne, se décide, se propose, et se mérite, tout de suite – même s’il ne vient pas tout de suite/maintenant !
Est-il temps d’apprendre comment calmer un peu le feu de nos cerveaux ? L’époque de donner de l’énergie (donc aussi de la finance) pour des recherches qui vont là où il y a vraiment un peu d’espoir ? Par exemple un fonctionnement et un stockage plus congruent de l’énergie, des recherches en santé hyper-prometteuses, des accompagnements réalistes pour des gens -et des enfants nouveaux- qui vont avoir besoin d’inventer de nouveaux modèles ?
Un nouveau modèle qui peut-être déjà émerge ? Un modèle encore fragile, comme un début qui se cherche ? Ce « un petit peu de bonheur tranquille qui calmerait un peu notre cortisol » transmettrait-il peu à peu une permission, essentielle pour se sentir bien dans le moment : celle de l’estime de soi ? Qui rebondit en l’autre, et débouche parfois sur des accords de confiance ?
Les trouvailles qui font que l’homme se sent grand d’être en accord avec lui-même risquent de nous surprendre de simplicité. Mais avant d’arriver à ce simple (artistique) faudrait-il que nous comprenions que « nous sommes maintenant programmés pour faire la tempête » et que, lorsque nous avons peur, notre cerveau (reptilien) nous commande d’attaquer ou fuir comme des bêtes – par les chemins neuronaux déjà pré-tracés ?
Un petit pas en avant, un petit pas en arrière, ai-je répondu à mon ami, est-elle là notre capacité à ne pas avancer ?